Le dojo des anciens
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Le dojo des anciens

Un lieu de savoir et de connaissances... ou de déconne et de non sens, au choix. Des gens plus ou moins bizarres viennent par ici, surtout des bizarres en fait... mais n'ayez pas peur ils ne mordent pas... enfin pas tous...
 
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 Destinées

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Lion Rafale
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Lion Rafale
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Lion Rafale


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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeVen 23 Nov - 16:03

Chapitre 3 : Les Lois Du Sang
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Partie 9 : A Feu Et A Sang

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Une dizaine de maisons attroupées ici, sans logique apparente, de part et d’autre d’un sentier caillouteux. Bâties sur deux niveaux pour la plupart, certaines n’en possédaient qu’un seul. Toutes construites dans des matériaux que Lion fut incapable d’identifier à cause des flammes qui les voilaient ; toutes construites dans des matériaux très inflammables. A travers leurs encadrements carbonisés, celles dont les fenêtres ou les portes avaient déjà été soufflées paraissaient cracher de longues langues mouvantes aux couleurs vives et meurtrières.

- C’est moi qui ai fait ça, murmura-t-il, immobile, les yeux et la bouche écartelés par un rictus de satisfaction et de fascination mêlées.

Les bâtiments qui attisaient d’avantage la fureur de l’incendie étaient plus bas que les autres, surmontés de toits qui semblaient avoir été plats. Il en compta cinq. Emanaient d’eux des cris différents de ceux qui provenaient des maisons : des cris d’animaux. Dans le brouhaha général, Lion crut entendre des chèvres, des moutons, des cochons, ainsi qu’un petit nombre de chevaux. Ce détail à l’insignifiance percutante lui fit penser aux paroles que lui avait dites le Marquis Rouge, la veille, lorsqu’il était entré en contact avec son fouet pour la première fois. Il ne se souvenait pas avec exactitude des termes qui avaient été employés, mais il se rappelait néanmoins parfaitement qu’ils avaient un rapport avec des flammes destructrices.

- Il m’a parlé de flammes pareilles à celles qui sont en train de baiser sous mes yeux, ce mec est un génie.

Il sentit quelque chose se poser doucement sur son épaule. La main de Leona. La beauté de sa sœur l’éblouit au point qu’il oublia tout le reste. Derrière et autour d’elle, les flammes dansaient dans l’unique but de soutenir sa splendeur, les victimes du feu hurlaient en déambulant partout afin de jouer une mélodie violente et funeste en son honneur, une mélodie dont chaque note épousait les traits si parfaits de son visage. Un sourire fantomatique relevait le coin de ses lèvres.

- C’est ton œuvre, susurra-t-elle d’une voix à peine perceptible. J’y participerai, je la respecterai comme je te respecte, si tu m’y autorises.

- Bien sûr, je t’y autorise. Tu es moi, Leona, je suis toi. C’est ensemble que nous achèverons cette œuvre. Je te laisse l’honneur de commencer.

- Merci.

Leona inspecta les alentours, à la recherche de la première personne à abattre. Il y en avait beaucoup, probablement une quinzaine, affairées à courir dans tous les sens, à brailler leur effroi. Trois hommes munis d’énormes seaux fuyaient le village en direction de l’étang.

- Il y en a tellement, constata-t-elle. Ils grouillent au cœur de ce monde dénué de valeurs, vulgaire meute d’insectes écervelés. Aussi vulnérables que des cafards à l’agonie, aussi impressionnables qu’une bande de rats mal organisés, ils ne méritent même pas d’offrir leurs âmes à Soul Edge. C’est pourquoi ils doivent mourir maintenant, avant le réveil de notre maîtresse.

Elle jeta finalement son dévolu sur une petite fille blonde emmitouflée dans une épaisse robe bleue. La gamine était assise dans l’herbe, à l’écart de tout, à l’abri de tout, même des regards. Ses yeux étaient inondés de larmes, et de là où elle se trouvait, Leona sentait qu’elle était perdue, terrorisée, loin des siens que le feu avait tout juste emportés dans un autre monde. La proie idéale.

Leona parcourut les quelques mètres qui la séparaient de sa future victime en se délectant de la peine que celle-ci éprouvait. Après vingt-quatre heures passées à ressentir toutes sortes de sensations qui ne lui appartenaient pas, elle commençait à en arriver à la conclusion que la colère – moins prononcée que celle que Lion avait enduré avant l’incendie – et la peine étaient les deux qui lui procuraient le plus de plaisir. La première était acide et salée, la seconde amère et sucrée ; toutes deux étaient absolument exquises.

- Comment t’appelles-tu, petite fille ? fit-elle de sa voix la plus douce en s’accroupissant face à l’enfant.

La gamine leva son visage mouillé. Elle ne devait pas avoir plus de sept ans. Ses joues rondes avaient conservé l’aspect caoutchouteux d’un bébé, ses immenses yeux gris évoquaient le désespoir et l’innocence et le bout de son petit nez rond était tout rose. Jolie petite fille devant les griffes tranchantes et impitoyables de la mort. A cette idée, Leona frissonna d’excitation.

- Je m’appelle Elisa. Papa et maman sont… Ils sont…

- Ils sont restés dans la maison et le feu les a eus, dit Leona. Je suis sincèrement désolée, Elisa.

Elle l’était vraiment, d’une certaine façon. Non qu’elle eût pitié de la fillette, mais elle n’enviait pas sa place. Il s’agissait peut-être de la loi la plus cruelle de la nature : les plus faibles, les plus inutiles, ceux qui ne servaient aucune cause valable, finissaient toujours par être mangés par plus fort qu’eux. Cette règle était universelle ; elle s’appliquait à toutes les époques, à toutes les cultures, à tous les lieux et de ce fait, Leona comptait bien la faire appliquer ici et tout de suite. Après tout, elle ne ressentait plus grand-chose de personnel depuis qu’elle avait été investie de son pouvoir – les émotions de ceux qui se trouvaient dans son champ de vision prenaient beaucoup de place –, ce qui faisait d’elle un excellent juge de la nature humaine, neutre et impartial.

- La vie est dure, très dure. D’autant plus dure quand on n’est rien de plus qu’une petite fille…

De gros nuages noirs semblables à ceux qui envahissaient le village ardent assombrissaient le regard et l’esprit d’Elisa au fil des paroles de Leona.

- Heureusement pour toi, je suis là. Je vais m’occuper de toi, tu sais. C’est mon rôle, je m’occupe des gens à qui plus rien ne sourit, de ceux que plus rien ne rattache à la vie.

Sur ce, Leona ouvrit ses bras à la gamine qui vint s’y loger sans se faire prier.

- Ca va aller, petite fille.

Un corps frêle secoué par le chagrin s’agitait contre elle, des larmes brûlantes coulaient entre ses seins, de fines mèches de cheveux chatouillaient son menton. Elle sentait bien toutes ces choses. Mais ce qu’elle sentait plus que tout au monde, c’était le regard observateur de Lion qui, même si elle lui tournait le dos, était braqué sur elle et attendait la mise à mort avec une ferveur des plus impatientes, elle en était persuadée. Il ne fallait pas le décevoir. Elle ignorait de quelle manière il était parvenu à mettre le feu au village, mais il l’avait fait, et c’était son œuvre qu’ils étaient en train de peindre. Leur œuvre.

- Ca va aller…

Après avoir refermé ses doigts sur le manche de la dague qui dormait contre sa hanche droite, elle la retira de son étui d’un geste discret et silencieux. L’arme était réveillée, prête à exécuter les pires ordres de sa propriétaire, sans éprouver le moindre scrupule.

- Fais dodo, petite fille.

En s’immisçant dans le ventre de la fillette, la lame émit un long chuintement grinçant. La fillette elle-même émit de longs chuintements grinçants lorsqu’elle bascula en arrière, les yeux vitreux, un mince filet ensanglanté dégoulinant de sa bouche à demi-ouverte par la stupéfaction. Volontairement ou pas, Leona l’aida à s’allonger doucement dans l’herbe.

- Maintenant, il est l’heure de mourir.

Elisa sifflait bruyamment lors de chacun des mouvements de sa respiration, elle était sur le point de mourir. Sur le point seulement, et ce que Leona découvrit quand elle posa son œil sur la mourante la fascina. Elle qui avait prévu de trancher la gorge de sa victime pour s’abreuver de son sang préféra ne rien en faire et se nourrir des ultimes sentiments de l’enfant. Il s’agissait d’un mélange de sérénité et de bien-être, piqués d’une pointe de fatalisme. Une mixture tellement harmonieuse, tellement délicieuse, qu’elle ne pouvait être que le cadeau que la mort offrait aux êtres qu’elle happait.

- Qu’est-ce que tu attends, Leona ? fit la voix de Lion derrière elle. Bois son sang ! Décris-moi son goût !

Elle allait lui répondre qu’elle préférait le goût de derniers ressentis de la petite fille à celui de son sang, mais se ravisa. Lion ne serait certainement pas en mesure de saisir le bien que lui procurait la présence de la mort. Ne voulant pas pour autant le décevoir, elle décida tout de même de lui obéir, pour ne pas l’irriter. Sans quitter Elisa de son œil, elle lui trancha la gorge d’un rapide coup de dague. Comme elle s’y attendait, le sang coula à flots, et comme elle s’y attendait, sa saveur était loin d’être aussi succulente que celle des émotions qu’elle n’avait pas cessé de boire. Le fluide rouge n’était pourtant pas mauvais. Simplement trop commun, pas assez surnaturel.

- Alors ? C’est bon ? Tu te régales ?

Sa bouche fixée à la plaie sanglante, sa moitié de regard collée au corps presque éteint, Leona aurait souhaité être seule, déguster ce moment unique en paix. Mais comme ce n’était malheureusement pas le cas, elle dut tourner la tête vers son frère et lui faire un grand sourire pour lui montrer qu’effectivement, elle se régalait.

- J’en étais sûr ! glapit Lion. Quand je t’ai vu choisir cette petite pute, j’étais sûr que tu adorerais son sang ! A mon tour de jouer !

Qui allait-il bien pouvoir faire crever ? Le vieillard isolé que l’épais nuage de fumée noire était en train d’asphyxier ? Pas assez consistant. La femme éplorée qui hurlait à la mort au beau milieu du village ? Ses cris n’étaient pas assez poignants, à peine dignes d’une mauvaise comédienne. Le jeune homme torse nu qui aidait péniblement une femme qui devait être sa grand-mère à émerger de l’enfer ? Trop laid. La petite fille qui pleurait, seule, au milieu des flammes ? Leona venait de tuer une gamine et, de toute façon, celle-là allait bientôt servir de nourriture à l’estomac insatiable qu’était le brasier.

- Lion ! cria Anussim, quelque part. Viens t’amuser avec moi !

Sa requête alla se fondre dans les nombreux appels au secours restés sans réponse. Lion était bien trop occupé par l’observation d’un père et de ses deux enfants qui fuyaient en direction du nord-est pour s’en soucier. Les cheveux de cet homme, de son fils et de sa fille étaient sublimes, ils avaient la même couleur dorée que ceux de Jonathan. Ce cher petit Jo avait laissé une famille derrière lui, semblait-il.

- Une belle petite famille qui ne va pas tarder à aller le rejoindre…

Sur ces mots, il se lança tranquillement à la poursuite des trois personnes qui, il en était convaincu, étaient le père de Jonathan, son petit frère et sa petite sœur. Cette distraction allait lui faire du bien, l’aider à oublier ce qu’il avait vu quand Olive avait posé sa main sur lui, l’aider à oublier qu’il avait été salement tué par un ange de la mort à peine une heure auparavant.
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Lion Rafale
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Lion Rafale


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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeVen 23 Nov - 16:04

- Lion ! s’écria Olive en le voyant disparaître à travers la fumée et les flammes. Lion, reviens !

Mais Lion ne l’écouta pas, ne l’entendit même certainement pas. Olive était inquiet pour lui. Il lui fallait trouver la sœur de Lion, celle qui ressemblait à la femme qu’il avait aperçue près du Marquis Rouge au moment de s’approprier ses chaînes. Où était-elle ? Impossible de le savoir. Au cœur de ce paysage bruyant et étouffant, il ne distinguait rien à plus de cinq mètres de lui. Sur sa gauche, il apercevait cependant très clairement l'ombre bleue et jaune du garçon clownesque qui paraissait beaucoup apprécier Lion. Le bouffon avait sorti trois poignards de sa ceinture et était en train de jongler avec eux comme avec de simples balles. Il riait, chantait, dansait, perdu au beau milieu des ombres et des flammes, s’amusant sans doute de la désolation environnante.

- Comment t’appelles-tu ? cria Olive en s’approchant de lui.

Il avait parlé très fort, pour laisser une chance à sa voix de percer le vacarme provoqué par toute l’agitation, et le bouffon eut l’air de se sentir agressé. Il cessa immédiatement ses singeries et le considéra de la tête aux pieds. Son visage décomposé transpirait la démence : ses yeux immenses pétillaient d’une lueur trop sombre, son sourire maquillé de noir était éclatant et ses cloisons nasales sautillaient sans arrêt.

- Pourquoi cette question ? couina-t-il.

- Je suis Olive. Je suis du côté de Lion, tout comme toi. Nous devons le retrouver, il a quitté le village !

Contre toute attente, le sourire du bouffon s’effaça soudain au profit d’une grimace à la signification diffuse. Olive n’aurait su dire si elle exprimait la colère ou la tristesse.

- Il a quitté le village ? Et bien retrouve-le ! Quand tu l’auras retrouvé, attends-nous, Leona et moi ! Pour le moment, nous avons un jeu à finir ! Nous ne serons pas longs !

Olive acquiesça avant de disparaître, pour le plus grand plaisir d’Anussim. Il ne savait pas qui était cet Olive, ni même ce qu’il faisait ici, mais il ne l’aimait pas. Apparemment, il voulait protéger Lion, et quelque chose lui disait que Leona lui en serait reconnaissante, qu’elle ne le considèrerait jamais comme un minable.

Cesse d’être un minable. Depuis que Leona les avait prononcés, ces mots flottaient dans son cerveau. Ils y étaient imprimés, gravés comme l’air obsédant d’une chansonnette impossible à oublier. Désireux d’obéir à ces paroles résonnantes, il savait ce qu’il devait faire. Il était clair que Lion et Leona méprisaient la majorité des êtres humains. A tort ou à raison, là n’était pas la question. Le fait était qu’ils préféraient à peu près les morts aux vivants.

- Si j’arrive à tuer du monde, beaucoup de monde, peut-être que je gagnerai leur respect, à tous les deux…

D’un coup d’œil malicieux, il inspecta brièvement les alentours. Les personnes que le feu n’avait pas tuées, celles qui n’avaient pas encore eu la bonne idée de partir, tourbillonnaient dans les flammes, les unes leur offrant leurs vies, les autres cherchant à échapper à leur étreinte mortelle. Anussim aurait pu s’attarder longtemps devant cette vision aussi hypnotique et amusante qu’une spirale aux couleurs vives. Toutefois, il ne s’accorda pas cette partie de plaisir. Il était l’heure de passer à l’action, de sérieusement commencer à cesser d’être un minable. Il tenait trois poignards dans sa main droite ; il en rangea deux dans sa ceinture.

- Au feu ! Au feu ! hurla-t-il en se jetant sur la première femme qu’il trouva, une petite maigrichonne aux cordes vocales acérées dans le front de laquelle il planta la lame de son couteau.

L’arme entra et sortit de sa cible avec une aisance surprenante, y laissant une marque humide et rougeâtre dont l’aspect évoquait celui d’un cratère. La femme s’effondra lourdement, comme évanouie. Quelqu’un poussa un cri derrière Anussim. Apparemment, ce qu’il venait de faire avait été aperçu, perçu comme quelque chose de répréhensible, voire d’effrayant. Plutôt flatteur. Il se retourna et se retrouva nez à nez avec un grand adolescent dénudé. De la fumée embuait son visage. Pas assez, cependant, pour parvenir à dissimuler la laideur de ses traits gras et acnéiques.

- Au feu ? fit Anussim au creux d’un gémissement.

L’expression du garçon qui se tenait devant lui passa de la peur à la colère en si peu de temps qu’Anussim, stupéfait, ne vit pas venir le poing lancé sur lui. Une demi-douzaine de secondes plus tard, il était allongé cul par-dessus tête. Un fou rire aigu et spasmodique faisait vibrer son corps et tinter les grelots accrochés à son bonnet de façon comique.

- Assassin ! fulmina le jeune boutonneux en abattant son pied en direction de son entrejambe.

D’une habile pirouette, Anussim évita le coup et se remit debout. Une fois face à son adversaire, il prit un peu d’élan, se jeta en avant, posa ses mains sur le sol graveleux. Il n’eut aucun mal à trouver l’équilibre requis pour tenir à la verticale, la tête à l’envers. La position n’était pas inconfortable, ni difficile à maintenir, ce qui l’étonna. D’autant plus qu’il ne se serait jamais pensé capable d’autant d’agilité. Néanmoins, il commençait à se faire à l’idée que beaucoup de choses avaient beaucoup changé depuis qu’il avait entendu parler de la guerre que se livraient Soul Edge et Soul Calibur.

- Jouer de l’heure est il, maintenant ! ricana-t-il.

Il croisa ses chevilles autour de la gorge du garçon afin de lui enserrer fermement le cou. Là, il plongea le poignard qu’il tenait toujours à la main dans un genou. La lame eut du mal à entrer tant la rotule était dure, elle n’enfouit à l’intérieur de l’os qu’une faible quantité de millimètres de sa tête déjà souriante de rouge. La chute du boutonneux et les hurlements claquants qui jaillirent de lui confirmèrent malgré tout que la manœuvre allait faire prendre un tournant décisif à la partie.

- J’ai gagné ! glapit Anussim en se réceptionnant gracieusement sur ses deux pieds.

- Sale enfant de démon ! gémissait l’autre, qui passait frénétiquement ses mains écarlates sur sa blessure.

Mais Anussim, absorbé par les multiples pensées qui lui traversaient l’esprit, ne fit pas attention à ce qu’il lui disait de sa voix inégale. Comment allait-il achever sa victime ? Comment Lion l’aurait-il achevée ? Comment Leona l’aurait-elle achevée ? Comment un homme raffiné, respectueux et intelligent l’aurait-il achevée ? La réponse était simple, et pourtant source d’un nombre incroyable de questions sous-jacentes : la victime devait souffrir, elle devait connaître une mort aussi atroce que l’avait été sa naissance.

- Qu’est-ce qui fait plus mal que mal ?

Tandis qu’il scrutait machinalement ce qui l’entourait, un mot sonna dans sa tête comme la plus évidente des révélations.

- Le feu, hoqueta-t-il en fourrant son couteau dans sa ceinture.

Non content d’être en proie à la puberté, le boutonneux allait devenir, dans un avenir plus que proche, la proie des flammes. Le devoir d’Anussim était de clore le jeu en l’y aidant. Pour ce faire, il l’attrapa par les épaules et le traîna, malgré ses protestations gesticulantes et les cadavres calcinés qui tapissaient le chemin, jusqu’à une maison qui n’en était plus vraiment une. Dévorée par des flammes plus hautes que toutes les autres de plusieurs mètres, la bâtisse ressemblait à un sac d’os géants, fracturés et noirs.

- Bienvenue en enfer ! chanta-t-il.

Une réplique digne des hommes raffinés, respectueux et intelligents, il en était sûr et certain. Au prix d’un effort qui lui parut inhumain, il parvint à offrir sa lourde charge au feu.

- La partie est terminée ! Souffre ! Crie ! Hurle !

Le jeune homme souffrit, cria, hurla, le cyclone flamboyant avala peu à peu sa silhouette. Anussim s’aperçut qu’il avait une érection. Elle n’était pas très vigoureuse, mais elle était présente, pour son plus grand bonheur. Les minables n’avaient pas d’érection quand ils tuaient. Il n’était donc plus complètement un minable.

- Je ne suis plus un…

Avant d’avoir pu achever sa phrase, il tomba dans les pommes.
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Zhou You
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeSam 24 Nov - 13:49

Psychopathes en force ! Trop bon ! La famille de Jonathan s'en sortira-t-elle ? Leona goûtera-t-elle finalement le doux nectar d'une mort savoureuse ? Olive ratrappera-t-il Lion ? Anussim, assommé, dort-il avec son pouce dans la bouche ? Vous le saurez, en regardant le prochain épisode !
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Akran
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeSam 24 Nov - 15:38

AAAAAAAAAAH !
(Mon premier message sur le forum pour une inscription pas très récente... Honte à moi =P)

C'est gore ! C'est psychotant ! C'est Lion =D !
J'ai commencé à lire vers 22h hier soir, j'ai repris à 11h ce matin, non stop, et je peux te dire, j'en sors tout à fait... effrayée que ça m'aie amusée oO"

C'est super bien écrit, sans fautes, avec de belles phrases, un vocabulaire innimaginable, enfin bref, bravo à toi !

J'adore les personnalités des personnages, super bien décrites, on s'y croirait presque. (Bien qu'on aimerait pas spécialement être à la place des personnages =P)

Voila. Continue ! Moi il faut que je regarde le reste du forum, un peu quand même...

Au passage, Laïonne, ton avatar je le trouve horrible xD M'enfin chacun ses goûts ! =P
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Shenlong
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeSam 24 Nov - 16:42

Bonne idée, Akran de venir un peu.


Sinon, chapitre sympathique mais un peu gratuit je trouve, à part un peu pour Nunus.
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeLun 26 Nov - 0:19

Le pauvre Lion va peut-être, un de ces jours, arriver à saturation de compliments, mais qu'importe: tes vertus d'écrivain m'étonneront toujours, et je t'exhorte à continuer cette fic qui, même si je viens pas souvent la commenter (hum), continue à me faire rêver (ouais, carrément).

Slurp !

Aaaaaah l'avatar de Lion il est moooooooooche !!!!!! Mouhouhaha !
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeLun 26 Nov - 2:00

Content de te revoir, Akran ! Et content que tout ça te plaise.

Je n'arriverai jamais à saturation de compliments. C'est toujours extrêmement agréable, parfois flatteur même (quand on te dit que t'arrives à faire rêver des gens, t'es obligé d'être flatté !), et ça me donne toujours envie de continuer, de me donner à fond pour la suite (en parlant de la suite, elle devrait arriver dans les prochains jours). D'ailleurs, je ne vous remercierai jamais assez pour vos critiques, positives comme négatives, qui m'aident beaucoup à élaborer la tournure de certains passages.

Episode gratuit ? Un peu, je l'admets. Mais c'est toujours agréable d'écrire des scènes de tueries, et je suppose que ça peut être cool à lire, une fois de temps en temps.

Mon avatar, j'en suis amoureux. ^^
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeLun 26 Nov - 22:24

Chapitre 3 : Les Lois Du Sang

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Partie 10 : La Destinée Du Marquis Rouge (1/2)

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14 octobre 1563

- Quelle est la conjugaison, le temps de l’indicatif ou du subjonctif, qui vous fascine ? demanda le Marquis Lion Von Heidern à son invitée d’un ton détaché. Quelle est la façon de verser les mots que vous préférez ?

Dame Lara et lui étaient réunis depuis les premières heures de l’après-midi. Pas un seul regard n’avait été échangé, uniquement des paroles. Il se tenait debout, face au titanesque et somptueux miroir encadré d’or, tandis qu’elle était confortablement installée au centre de la banquette de velours rouge qui trônaient tous deux depuis plusieurs dizaines d’années dans le petit salon situé au rez-de-chaussée du château de la famille Von Heidern. Causant de tout et de rien, se rencontrant souvent jusqu’à plusieurs fois par semaine, les deux amis éprouvaient parfois quelques difficultés à s’entendre sur un sujet de conversation satisfaisant. Voilà pourquoi le Marquis avait lancé cette question, inopinément, dans le but d’avoir quelque chose à dire, de ne pas se laisser tuer par l’ennui qui le menaçait de plus en plus pesamment.

- J’offre ma préférence aux temps de l’indicatif, déclara la dame.

- Vraiment ? fit mine de s’étonner le Marquis en réajustant le col de sa veste blanche.

Treize roses aux pétales rouges et sombres, profondément sanguines, reposaient dans un vase posé sur le rebord de la cheminée en marbre noir surplombée par le miroir. Il en cueillit une et entreprit de se caresser le visage avec, sans quitter son reflet des yeux. Ce qu’il voyait – la plus belle fleur du monde se lovait contre le plus bel homme du monde – enlaça ce qu’il ressentait – les pétales contre sa joue lui laissaient l’impression d’être couché sur de la soie fraîche – pour lui faire endurer un frisson aussi long que délicieux. Il avait déjà vécu cette situation un millier de fois auparavant, et les sentiments qu’elle lui procurait semblaient ne jamais vouloir diminuer. Il s’agissait là du propre de la perfection, tellement surprenante qu’il était impossible de s’y accoutumer, même en la côtoyant au quotidien, même en étant elle.

- J’aime les temps de l’indicatif, reprit Dame Lara de sa sempiternelle voix de cantatrice. Le passé simple. La rupture qu’il créé avec le présent, les cicatrices indélébiles dont il nous écorche peuvent être cruelles, mais elles n’en demeurent pas moins bellissimes.

Le Marquis daigna enfin lui accorder un regard. Cette femme était aussi ridicule et extravagante que les propos qui coulaient de ses lèvres dégénérées.

- Comme je vous comprends, mentit-il.

L’arme d’un dangereux rival avait expédié l’époux adoré de Dame Lara en enfer, il y avait bien longtemps. La veuve n’avait jamais su faire son deuil, son esprit avait fini par chavirer au plus profond d’une folie dont les frontières dépassaient largement celles de n’importe quel autre désordre mental. Elle s’était mise à haïr le monde, la nature humaine, leurs lois et leurs principes, à se vêtir uniquement de noir, à porter de hautes perruques informes et incolores, à avoir des réactions émotionnelles incontrôlées et, surtout, elle s’était mise à le fréquenter lui, le Marquis Rouge.

- Comme je vous comprends…

Les esprits torturés avaient le don de fasciner le Marquis, c’était pour cette raison qu’il tolérait la présence de Dame Lara. Il lui arrivait, de temps en temps, d’apprécier sa ténébreuse compagnie, mais il ne la considérait généralement pas mieux qu’une imbécile ridicule et extravagante, tantôt divertissante, tantôt ennuyeuse. En l’occurrence, aujourd’hui, elle avait décidé d’être ennuyeuse. Le Marquis regrettait de ne pas avoir préféré aller chasser en compagnie de sa sœur.

- Qu’en est-il de vous, doux Marquis Rouge ? Quel est le temps, quelle est la conjugaison qui exalte vos sens et vous fait rougir lorsque vous osez l’employer ?

Le Marquis appuya son pouce contre la queue de sa rose. Une épine pénétra vivement sa chair ; une douleur à peine perceptible le piqua. Il déposa la fleur sur le rebord de la cheminée et examina son doigt blessé durant un long moment. Ronde, immobile, minuscule, la goutte de sang brillait de mille feux. Contrairement à sa forme, sa couleur était loin d’être dénuée de sens. Son intense teinte pourpre provoquait, attirait, alléchait, donnait soif. Grâce à elle, Lion Von Heidern éprouvait sans cesse beaucoup de fierté. Car c’était à elle que les imbéciles se référaient quand ils le surnommaient « Marquis Rouge ». La couleur du sang, la perfection et lui-même étaient trois valeurs indissociables, les deux premières faisant partie de la troisième et la troisième faisant partie des deux premières.

- J’aime le plus-que-parfait, dit-il en ouvrant un petit placard qui contenait le nécessaire à la dégustation de son élixir favori.

La bouteille qu’il ouvrit avait la forme d’une bouteille de vin et le liquide qu’elle déversa lorsqu’il l’inclina au-dessus de son verre avait bel et bien un aspect velouté et rougeâtre. Mais parmi toutes les bouteilles qui dormaient dans les immenses caves du château, aucune ne contenait la moindre goutte de vin. Au lieu de cela, elles étaient pleines de la réponse amère à tous les mystères qui entouraient le Marquis Rouge depuis d’innombrables années.

- Le plus-que-parfait ? Pourquoi donc ?

Il trempa le bout de ses lèvres dans son verre, huma les vapeurs âcres et enivrantes qui émanaient du précieux fluide, puis hésita un instant afin de faire durer le plaisir de l’attente avant d’avaler trois longues gorgées qui illuminèrent les parois palpitantes de son œsophage. Il s’approcha ensuite à pas lents de l’unique fenêtre dont disposait la pièce – une gigantesque porte vitrée qui donnait sur une jolie terrasse en arc de cercle où les soirées d’été s’avéraient souvent savoureuses – en engouffrant une grosse bouffée d’air.

- Parce que je suis moi-même plus que parfait, souffla-t-il.

De là où il se tenait, une vue absolument imprenable s’offrait à lui. L’automne était arrivé, les rosiers ne se portaient pas très bien et les allées caillouteuses qu’ils encadraient paraissaient plus sinistres que jamais sous le ciel gris percé de lueurs jaunes. Ce jardin à l’agonie, qu’il connaissait par cœur, n’était pas intéressant. En revanche, ce qui l’était davantage, c’était la personne qui venait de passer le portail et qui se dirigeait hâtivement vers la porte principale du château. Et ce qui l’était plus encore, c’était la chose que tenait cette personne. Ou plutôt qui tenait cette personne.

- Dame Lara, frissonna-t-il tandis qu’il observait goulûment ce qui se rapprochait de lui, je vais officiellement devenir l’homme le plus puissant de ce monde… L’imparfait m’apporte le présent et le futur.

Dame Lara se leva, se posta au beau milieu du petit salon et se mit à tourner sur elle-même en riant telle une enfant emplie d’innocence. Les nombreuses vagues noires soulevées par sa longue robe virevoltante s’échouaient dans les tréfonds de l’atmosphère, enveloppées dans autant de sons légers et voilés. Les éclats de voix limpides qui déferlaient de ses lèvres vermeilles à un rythme harmonieux en disaient long sur l’admiration qu’elle vouait au Marquis Rouge.

- Veuillez cesser, Dame Lara ! aboya le Marquis en lui jetant un regard infernal. Allez plutôt chercher Olive ! Je devrais avoir besoin de lui dans peu de temps.

La folle obéit immédiatement, sans broncher. Dès qu’elle eut quitté la pièce, que l’écho feutré de ses pas dans le couloir se fut évaporé, le Marquis se relança dans la contemplation de ce que l’ancien forgeron de Madame Leona Von Heidern, sa sœur, avait en sa possession. Ou plutôt de ce qui le possédait.
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Lion Rafale
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeLun 26 Nov - 22:25

- Enfin, Soul Edge va devenir mienne…

Dehors, à seulement quelques mètres de lui, se trouvait la relique qu’il convoitait depuis qu’il était en âge de faire preuve d’autorité. DabilahroMaster, l’imbécile à qui il avait ordonné de la lui trouver sept ans auparavant, l’imbécile qu’il avait longtemps cru mort, aussi mort que tous les abrutis à qui il avait confié la tâche colossale de lui dénicher l’Epée des Héros, discutait avec le garde de la porte principale du château. Soul Edge dormait paisiblement à leurs pieds, son grandiose pommeau logé dans le poing ganté d’acier noir de l’imbécile, sa magnifique paupière close.

- Plus belle que mes rêves les plus débridés, plus désirable que ma sœur, plus fidèle que tous mes alliés, plus puissante qu’un empereur. Comme tu me ressembles. Toi et moi allons accomplir de grandes choses, Soul Edge, j’ai d’horribles projets pour nous deux.

DabilahroMaster venait d’entrer dans le château, il allait être ici d’un instant à l’autre. Lion Von Heidern avait conscience que l’ombre de la mort planait sur lui. Il savait pertinemment que les êtres qui s’emparaient de Soul Edge n’étaient plus vraiment eux-mêmes, qu’elle dévorait leurs âmes de quelque obscure manière, les rendant esclaves de sa faim démesurée de destruction. De ce fait, l’imbécile n’était certainement pas venu jusqu’ici pour lui remettre sa merveilleuse découverte. Il devait être ici pour le tuer. Le Marquis n’avait cependant pas peur. Bien au contraire, il sentait que ce jour allait rester inscrit dans sa mémoire pour l’éternité.

- Et même s’il est écrit quelque part que je dois mourir ce soir, Olive sera là pour rétablir le juste ordre des choses.

L’imminence du grand moment le faisait frémir d’excitation. Un ricanement grinçant ponctua sa phrase, immédiatement talonné par des cliquetis métalliques espacés d’intervalles irréguliers en provenance du couloir. Après tant de pénibles années d’attente, il n’avait plus qu’une dizaine de minuscules secondes à patienter.

- Plus que… Plus que quelques instants et son âme sanguinaire sera nôtre, ma belle, hoqueta une voix déformée par des sentiments irrationnels proches de la haine.

La voix de DabilahroMaster, ou ce qu’il en restait, du moins.

- DabilahroMaster ? s’écria le Marquis, que la bouche tremblante de l’euphorie commençait à avaler. Est-ce bien vous que j’entends venir jusqu’à moi ?

- Comment m’avez-vous reconnu ? tonna l’autre.

Il était l’heure pour le Marquis Rouge d’embrasser sa destinée. Il se débarrassa de son verre à moitié vide, inspecta une dernière fois son reflet dans le miroir, se força à emprunter un large sourire et quitta le petit salon, le ventre ravagé par des incendies d’émotions semblables et supérieures à celles conférées par un orgasme.

Il fut tout d’abord choqué par les transformations qu’avait subi le physique de DabilahroMaster. Sept ans auparavant, quand il avait juré qu’il reviendrait victorieux avant une décennie complète, il était encore un très beau jeune homme au regard bleu, aux traits pâles, lisses et fins. Désormais, ses yeux n’étaient plus que deux orbites creuses dans lesquelles trônaient deux globes presque ronds, presque rouges. Quant à son visage ruisselant de transpiration et de fatigue, l’ange qui l’avait un jour habité avait depuis été chassé et remplacé par un démon, dieu malgré lui de la laideur.

- Sachez que je saurais reconnaître votre démarche parmi mille, ricana le Marquis. Je vois que vous me ramenez l’Epée des Héros. Comme promis, je vous offrirai dès demain la main de ma chère sœur.

Ce fut laborieux, mais DabilahroMaster parvint, au prix d’un effort avoué, à brandir Soul Edge au-dessus de la tête du Marquis. Là, ce dernier fut interloqué par l’imposante taille de l’Epée des Héros, par les couleurs surnaturelles de son gros œil injecté de sang et, surtout, par ses splendides contours acérés qu’il distinguait assez nettement compte tenu de la pénombre. Il s’était grossièrement trompé à son sujet : par orgueil, il l’avait pensée son égale, alors qu’elle était en fait inégalable.

- Tu vas mourir, Von Heidern !

L’imparfait abattait l’inégalable intemporelle sur le plus-que-parfait. Lion Von Heidern bondit en arrière et la chute de Soul Edge fut compromise par un projectile enflammé qui fondit sur DabilahroMaster comme un aigle aux ailes de feu sur sa proie, le percuta en plein visage et le mit au sol.

- Qu’est-ce que le feu a à voir dans toute cette histoire ? rugit le Marquis Rouge, qui était soudain très désireux de rire.

Couché sur le molletonneux tapis sombre qui recouvrait le plancher du corridor, DabilahroMaster se débattait sous les baisers ardents de la douleur. Les plaintes qu’il émettait n’étaient pas celles d’un homme, mais d’un animal à la voix rompue, aiguë et agitée de tressaillements. Les doigts de sa main gauche étaient crispés sur ses yeux, ceux de sa main droite sur le grandiose pommeau de Soul Edge. Le Marquis brûlait d’envie d’aller admirer de plus près l’état de son visage, probablement aussi défiguré que ceux de tous les êtres qui avaient, un jour, réussi à lui faire peur ou à le mettre en colère au point de se prendre une boule de feu surgie de nulle part en pleine face. La pratique régulière et assidue de la magie noire offrait certains avantages.

- En règle générale, leurs gueules sont aussi dégoulinantes qu’une bougie allumée depuis trop longtemps, hurla-t-il. Et toi, enfant de putain, as-tu l’impression d’être fait de cire chaude ? Tu vas me donner Soul Edge, que tu le veuilles ou non ! Puis tu obéiras à mes instructions, puis tu te marieras avec ma sœur, puis tu lui feras un fils, puis tu m’aideras à conquérir le monde !

Contre toute attente, DabilahroMaster se redressa et se mit à rire. D’un rire glacial, sardonique. Comme l’avait deviné le Marquis, son visage bavait une bouillie rouge et blanche, mélange de sang et de parcelles de peau fondue, mais cela ne semblait plus du tout le déranger. Au centre de cette mixture gluante, les deux billes écarlates qui lui faisaient office d’yeux brillaient. D’amusement ou d’impatience ?

- Dans tes rêves, sale cabot, dit-il quand il eut tout à coup cessé de ricaner.

Le Marquis n’en croyait pas ses oreilles ; l’imbécile osait le contredire. Pire, il venait de l’insulter. C’était le meilleur moyen de le mettre hors de lui.

- Je vais te faire trépasser, enfant de putain ! siffla-t-il d’un timbre rauque et tremblant.

Alors qu’il s’apprêtait à se jeter aveuglement sur DabilahroMaster, une réplique cinglante le coupa dans son élan.

- Contrairement à la chienne qui t’a mis au monde, vieux fou, ma mère n’était pas la sœur de mon père, lâcha l’enfant de putain sur le ton de la plaisanterie.

Malheureusement, Lion Von Heidern avait laissé son fouet à treize lames – la queue épineuse et douloureuse de la plus imposante des roses sauvages – dans sa chambre, il n’allait donc pas être en mesure de faire subir à cet imbécile insolent les supplices qu’il souhaitait lui faire avaler de force. Dommage. Une autre idée lui vint toutefois à l’esprit : l’attirer dans la cour du château, là où ses gardes ne manqueraient pas de s’occuper de lui. Bien sûr, il leur ordonnerait de ne pas le tuer, de lui faire seulement un peu mal. Il ne manquerait d’ailleurs pas d’insister sur le « un peu ».

- Je saurai laver la mémoire de mes parents des immondes insultes dont tu viens de les affubler. Viens te battre, DabilahroMaster ! Viens me remettre Soul Edge, mon dû le plus précieux.

Sur ces mots, il fit volte-face et se précipita dans son petit salon. Au vacarme creux que produisaient les pièces de son armure en s’entrechoquant, il devina que l’imbécile lui courait après. Son plan fonctionnait.

- Von Heidern ! Ton heure est venue !

Parfait. Lorsqu’il fut dans la pièce au titanesque et somptueux miroir encadré d’or, il se jeta sur la gigantesque porte vitrée. Quand il l’aurait franchie, il ne lui resterait plus qu’à enjamber la balustrade de la jolie terrasse en arc de cercle où les soirées d’été s’avéraient souvent savoureuses. Là, tous les gardes du château ne tarderaient pas à lui tomber dessus.

- Attrape-moi !

Mais le Marquis n’eut pas le temps d’atteindre la fenêtre. Il n’était plus qu’à une infime poignée de centimètres d’elle quand quelque chose le transperça de part en part, entra en lui par le creux de ses reins, brisa sa colonne vertébrale au cours d’un terrible bruit de papier froissé et sortit de lui par son ventre. La transcendante lame de Soul Edge l’avait empalé.

- C’est… Inutile, hoqueta-t-il.

Il sentait le goût bizarre de son propre sang envahir sa gorge et ses narines. C’était également son propre sang qui sortait de lui par giclées entières, aspergeant furieusement les murs, les meubles, le plafond et les tapis qui dormaient sur le sol. Le miroir, près de lui, ne fut pas épargné, et le Marquis vit son reflet se peindre de sa couleur préférée ; il vit son reflet se peindre en rouge.

- C’est inutile, Dabi… DabilahroMaster, murmura-t-il, souriant en dépit de la souffrance inhumaine qui broyait son corps. Je vais… Revenir… Tout va recommencer… Et… Et cette fois, je gagnerai !

Il fut pris d’un haut-le-cœur sonore. D’un geste sec, DabilahroMaster retira la transcendante lame ensanglantée de son corps. Lion Von Heidern s’affaissa sur ses genoux, observa le cratère qui déchirait son abdomen et vomit une substance brune et graveleuse. Il tourna une dernière fois la tête vers celui qui venait de jouer le rôle de son bourreau, comme quelques autres l’avaient déjà joué avant lui, afin de lui adresser un clin d’œil narquois. Bientôt, Olive arriverait et lui rendrait la vie en désorganisant les énormes aiguilles de l’horloge du temps. Bientôt, le Marquis annoncerait à Dame Lara qu’il aimait le plus-que-parfait. Bientôt, DabilahroMaster lui amènerait Soul Edge, essaierait de le tuer. Mais pour l’instant, il était temps pour lui de plonger, pour la dix-septième fois de sa vie, dans les mâchoires de la mort.


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Zhou You
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeMar 27 Nov - 2:01

Hé bé ! Mort dix sept fois ? On se croirait dans un jeu vidéo avec la fonction "Olive" heu... "Charger".
"Parce que je suis moi même plus que parfait" => J'aime bien cette réplique, digne de... de toi en fait Very Happy
Nous avons donc le début de la conclusion de cet événement qui a été sujet à polémique il y a bien longtemps, que dire de plus ? LA SUIIIIITE !

Vive le marquis rouge !
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeMar 27 Nov - 19:24

Hélas, je suppose qu'on attendra encore un peu avant d'avoir la conclusion de ce flashback.

En voila un chapitre qu'il est bon sinon. Plus agréable à lire que le dernier, bonne narration, surtout dans la seconde partie.
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Akran
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeMar 27 Nov - 19:56

Je m'attendais un peu au plus-que-parfait, mais pas à ce que Dabilahro l'empale comme ça. Bah, ça change rien, Olive remontra de toutes manières le temps Razz.
Mais ça me semble tout de même un peu simple... Bon bah attendons ^^

Bizarre, je ris aussi de la folie de "Dame Lara" Laughing

Belle description de l'estimation de Lion pour lui-même, en clair bon épisode ^^

Délecte toi de nos compliments ! Et, une fois que tu en seras devenu dépendant, j'achèterai les droits d'auteur de cette fic ! Je gouvernerai le monde !!!
Hum Very Happy
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeMer 28 Nov - 17:35

Mes aïeux, c'était jouissif !!

Beaucoup de réponses à de précédentes interrogations, de l'action à gogo, bref la totale ! La suite, et vite. Cool
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeMer 28 Nov - 22:32

Chapitre 3 : Les Lois Du Sang

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Partie 11 : Rêve Et Réalité

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Après avoir ouvert les yeux, Fred mit un long moment à se rappeler où il se trouvait et ce qui lui était arrivé.

Il ne se souvenait pas spécialement de la pièce dans laquelle il gisait, à même le sol, sur du plancher pourri recouvert de centaines de plumes blanches. Il ne se souvenait pas non plus des deux personnes couchées près de lui, un homme et une femme aux yeux clos. Tous deux ne portaient pas de vêtements et, à la façon dont ils étaient enlacés, il pensa qu’ils avaient peut-être dû s’évanouir non loin de lui, sûrement en même temps que lui, alors qu’ils échangeaient un gros câlin. Une situation bien improbable qui transparaissait pourtant comme l’unique explication plausible à tous les éléments présents autour de lui et qui ne laissaient pas l’impression d’avoir un quelconque rapport entre eux. Mais où était-il ? Au beau milieu d’un rêve ? Dans une maison de fous ?

Tu es au seizième siècle, déclara une voix familière nichée au fond de sa tête étourdie. Tu es au seizième siècle, pour défendre la bonne cause dans une guerre qui a déjà eu lieu il y a environ cinq cents ans, si l’on tient compte de l’époque de laquelle tu viens.

Au seizième siècle ? Il venait justement de faire un rêve très clair où deux hommes du seizième siècle s’entretuaient au nom d’une épée diabolique.

DabilahroMaster et le Marquis Lion Von Heidern sont les deux hommes que tu as vus. Ils se détestent mais servent la même cause : celle du mal.

En effet, DabilahroMaster et le Marquis Lion Von Heidern – le Marquis Rouge – étaient bien les noms des deux hommes dont il avait rêvé. Et il était vrai qu’aucun de ces deux individus n’avait l’air d’un enfant de chœur – l’euphémisme s’assumait pleinement –, mais merde, que pouvait-il bien foutre ici, dans une pièce puante inondée de plumes blanches ? Si connexion entre son rêve et la réalité il y avait, quelle était-elle ?

Regarde ce que tu tiens dans ta main droite, tu comprendras beaucoup de choses.

Voilà qu’il devenait fou, à écouter l’homme invisible lui donner des ordres. Néanmoins, il sentait bel et bien quelque chose de froid dans la paume de sa main droite. Lentement, il tourna les yeux vers elle.

L’épée qui t’a été remise à ton arrivée ici, au seizième siècle. Rappelle-toi : le ninja t’a convaincu de t’en emparer.

Sa lame était longue, fine et noire, son pommeau blanc représentait une croix. Il ignorait de quelle façon elle avait atterri dans sa main puisqu’il était formel : c’était la première fois de sa vie qu’il la voyait. En outre, qu’est-ce qu’un ninja venait faire là-dedans ?

Tu n’as pas envie de te souvenir ? Très bien ! Alors écoute-moi bien et fais ce que je te dis de faire, sans broncher. C’est pour ton bien, tu peux me croire. Ainsi que pour le bien de la race humaine. Tu vas te lever et enduire ton épée du contenu d’une fiole de poison. Les fioles de poison se trouvent dans la sacoche que tu portes à ta ceinture. Puis tu ordonneras à ta lame d’ôter les vies des deux personnes qui dorment près de toi.


S’il ne s’y trouvait pas déjà, il était bon pour l’asile psychiatrique.

Lève-toi !

Bonne idée. Sans même penser une seule seconde à lâcher son épée – juste au cas où –, il se mit debout. Il constata alors que son genou gauche et l’arrière de son crâne étaient meurtris par deux douleurs bien distinctes, mais aussi creuses et gênantes l’une que l’autre. Il avait dû recevoir des coups. Ou se faire mal en tombant, après avoir perdu connaissance.

Tu as reçu un coup dans le genou. Tu es tombé ensuite, l’arrière de ton crâne a encaissé la chute.


- Si tu le dis.

Maintenant, enduis ton épée du contenu d’une fiole de poison et ôte les vies des deux personnes qui dorment.


Certainement pas. Oter une vie, cela s’appelait un meurtre ; ôter deux vies, cela s’appelait un double meurtre. Or, il n’était pas un meurtrier. Non qu’il eût lui-même l’air d’un enfant de chœur – ce coup-ci, l’euphémisme était bien moins lourd de sens –, mais de là à assassiner deux personnes qu’il ne connaissait ni d’Eve, ni d’Adam, il y avait un nombre astronomique de pas qu’il ne se sentait pas prêt à franchir.

Je t’en prie, tue-les... Tu n’as pas idée des monstres qu’ils sont, dissimulés derrière leur apparence humaine.

Par sagesse, il choisit d’ignorer la voix de l’homme invisible, qui commençait à devenir sérieusement encombrante. Par curiosité, il décida d’inspecter de plus près les visages des deux personnes qui dormaient. Pour ce faire, il s’accroupit silencieusement au-dessus d’eux.

Tue-les !

- Tais-toi.

Bien qu’elle fût maquillée comme le plus fantomatique des camions volés, la jeune femme était jolie, dans le sens mystique du terme. Sa longue chevelure aux teintes boisées, dont la finesse étincelante faisait penser à celle d’une déesse, déferlait en cascade sur ses épaules nues, cachait ses seins, sans toutefois parvenir à camoufler leurs courbes charnues, rebondies, généreuses. Une petite plume blanche posée sur sa joue droite frétillait délicatement lorsqu’elle respirait, une petite plume blanche qui finissait de lui attribuer de poétiques airs d’entité supérieure. Si cette fille pouvait être n’importe qui, il était toutefois très clair qu’elle n’était pas un monstre.

Ne vois-tu pas qu’elle ressemble à Dame Lara, l’amie du Marquis Lion Von Heidern ? Tue-la !

- Je t’ai demandé de te taire !

Le jeune homme avait le teint blême de sa compagne, ainsi que sa couleur de cheveux. Lui aussi semblait venir d’une autre dimension, d’un monde où les êtres impressionnaient quiconque posait les yeux sur eux tant leurs traits inspiraient la finesse, la pureté. En l’occurrence, le fait qu’un homme possédât de tels atouts était gênant. Chez une femme, la finesse et la pureté attiraient ; chez un homme, elles énervaient.

Mais enfin regarde-le bien ! Il a le visage de DabilahroMaster ! Il est DabilahroMaster ! C’est une menace pour l’humanité ! Tue-le ! Tue-le !

Ce garçon avait un visage irritant, certes proche de celui de DabilahroMaster, mais cela ne faisait pas de lui un monstre, ni même une menace pour l’humanité. Tout au plus une menace pour un homme dont la petite amie aimait les jeunes mâles, filleuls des éphèbes de l’Antiquité. Rien de bien répréhensible, donc.

Comparer DabilahroMaster à un éphèbe ? Pendant que tu y es, pourquoi ne pas comparer le noir au blanc, le vice à l’innocence, la mort à la vie ? S’il vivait dans l’Antiquité, DabilahroMaster serait au moins la version masculine de la Méduse. Et encore, la Méduse se contente de te figer. Lui, il te dévore le cœur !


- Ca suffit ! DabilahroMaster n’existe pas ! Le Marquis Lion Von Heidern non plus ! Pas plus que Dame Lara ! Ils font partie d’un rêve stupide que j’ai fait, pas de la réalité. Tout comme toi ! Tu n’es pas réel !

Je suis réel ! Je suis une…

- Ta gueule !

Soudain, les paupières du jeune homme aux traits fins et purs – Dabilahro, le démon en armure noire dévoreur de cœurs, le barbare à l’ombre violette – s’ouvrirent, dévoilèrent des yeux d’un bleu dégoûtant qui absorba Fred malgré sa volonté de lui échapper. Il était effectivement fort possible que la pourriture eût un rapport avec une quelconque version masculine de la Méduse, puisque son regard fluorescent paralysa son esprit, l’empêchant de raisonner, le forçant à subir tous les douloureux souvenirs qu’il avait crus partis : son réveil, la veille, au cœur de la Renaissance, la mystérieuse lettre, Edge, Zhou et Ageha, son insatiable envie de débarrasser le monde de la présence des deux fléaux qu’étaient Dabilahro et Lara, la vision terrible qui l’avait empêché de les mettre en pièces et, enfin, comment son épée avait éventré un oreiller au lieu de les entailler, eux. Tous ces évènements défilèrent dans sa tête à une vitesse vertigineuse qui lui donna la nausée.

Son cœur bondit dans sa poitrine – au moins se trouvait-il toujours dans sa poitrine, battant comme un acharné, et non entre les dents d’un enfoiré – quand une main glacée lui agrippa le bras. Il ne lui en fallut pas plus pour l’arracher à sa torpeur. Les yeux scellés par l’effroi, il se dégagea de la dangereuse étreinte de celui qu’il avait pris pour un éphèbe innocent avec une telle vigueur qu’il crut qu’il allait y laisser de la peau.

- Putain de merde ! souffla-t-il, les poumons comprimés par la peur.

Même si ses os vacillaient sous la trop lourde pression de la panique, il trouva la force de se lever, de se retourner, de se jeter sur la sortie, et de claquer la porte derrière lui.

- C’est ça, décampe, sale chien ! entendit-il ricaner alors qu’il dévalait les escaliers de l’auberge quatre par quatre. Et que ça te serve de leçon !

Quand je pense que tu avais l’occasion de les tuer pendant leur sommeil et que tu n’en as rien fait, j’ai honte,
déplora la voix de l’homme invisible, cruellement réelle.


Dernière édition par le Mer 28 Nov - 23:29, édité 1 fois
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Shenlong
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeMer 28 Nov - 22:56

Cours mais bon et assez efficace. Un bon chapitre en somme.
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Zhou You
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeJeu 29 Nov - 13:27

Ouais, court mais amusant je trouve, car on risque effectivement de déplorer cette amnésie partielle par la suite.
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeJeu 29 Nov - 17:49

Oh la la ! Je viens de m'apercevoir qu'il y a du nouveau et il y en a même trop à mon goût : j'en étais resté à la partie 9 ! Mais n'espère pas m'avoir découragé Lion, je dirais TOUTE la suite ce week-end (pas le temps avant) et je te gratifierais d'un des commentaires dont j'ai le secret ! Twisted Evil
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Akran
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeJeu 29 Nov - 21:02

Bien, bien, bien ^^
Super ^^
Ainsi donc, on fait -3 morts. Ahlala, Olive en force ^^"
Désolée, pas de commentaire vraiment constructif cette fois-ci, juste que tu gardes toujours ce niveau impressionant ! Very Happy
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Lion Rafale
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeSam 1 Déc - 0:29

Chapitre 4 : Défis En Série

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Partie 1 : Formation D’Un Groupe

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- Le protecteur a dû remonter le temps, ce matin, répéta Zhou pour la énième fois. Sinon, je ne vois pas comment expliquer la troublante impression de déjà-vu que tu nous décris depuis tout à l’heure.

Otori le dévisagea froidement.

- « Sinon » ? Ca signifie que tu n’es pas sûr de ce que tu avances ? cracha-t-il.

Exaspéré, Edge leva les yeux au ciel. Après avoir précipitamment quitté la ville, Zhou, Ageha et lui avaient emprunté un sentier qui, d’après le ninja, menait au chasseur et à l’assoiffé de sang – le garçon. Etrangement, ils n’avaient pas eu à courir bien longtemps puisque le chasseur, Otori, avait croisé leur route. Zhou avait fait les présentations, puis le nouveau venu leur avait raconté qu’il avait attaqué Lion, mais que le combat avait été interrompu par un grand homme muni de chaînes noires et vêtu d’une armure rouge. Il avait bien insisté sur le fait que toute la période durant laquelle Lion et lui s’étaient faits face lui avait laissé « une troublante impression de déjà vu ». Toujours selon le ninja, ce que disait le chasseur était probablement vrai car les âmes de l’assoiffé de sang – le garçon – et du protecteur étaient réunies, ainsi que désormais celles de l’assoiffée de sang – la fille – et du bouffon fou. Quant à la « troublante impression de déjà-vu », il fallait croire qu’elle était explicable par l’aptitude que possédait le protecteur de remonter le temps.

- Je ne sais pas tout sur tout, fit Zhou.

Le ton ferme laissait supposer que la discussion devait s’arrêter là. Malheureusement, tout le monde ne perçut pas ce sous-entendu.

- Quand on ne sait pas, on se tait, reprit Otori.

L’espace d’une fraction de seconde, Zhou parut offusqué. La partie de ses sourcils que sa cagoule ne cachait pas se distordit selon divers angles, aigus puis obtus, d’une façon qu’Edge trouva presque comique. Il s’en voulait d’avoir envie de rire des malheurs du grand et ténébreux Zhou alors que le petit et insolent Otori n’avait pas cessé un seul instant de lui manquer de respect depuis qu’il les avait rejoints, mais la bizarrerie de la situation qui traînait trop en longueur l’énervait tellement qu’il préférait en subir la dimension amusante.

- Dans le rêve qu’il nous a été donné de faire, soupira le grand et ténébreux Zhou pendant que ses sourcils retrouvaient peu à peu leur emplacement d’origine, le Marquis Rouge meurt en se disant qu’il va revenir à la vie grâce au pouvoir de son protecteur. Dans la réalité, c’est la même chose. Je suppose donc que tu es parvenu à éliminer l’assoiffé de sang, ce matin, et que le protecteur l’a fait revenir à la vie grâce à son pouvoir.

- Lion et Olive, pesta sans attendre le petit et insolent Otori. Ils s’appellent Lion et Olive, alors arrête de leur donner des surnoms ridicules, s’il te plaît.

- Ce ne sont pas des surnoms ridicules, tu t’en rendras vite compte.

- Une histoire à dormir debout, ne put s’empêcher de lâcher Edge, espérant ainsi mettre un terme à leurs jérémiades inutiles. C’est d’ailleurs ce que je ne vais pas tarder à faire si je reste planté ici à attendre le déluge.

Zhou et Otori le foudroyèrent du regard. Seule Ageha lui fit les yeux doux. Gentiment postée près de lui, silencieuse, les mains croisées derrière le dos, les joues rougies par quelque intimidante émotion, elle était sacrément mignonne. Un joli petit sourire au coin de ses lèvres affichait clairement sa gratitude, démontrait à quel point sa subite prise de position la soulageait. Il s’apprêtait à lui rendre son sourire quand il lut dans ses grands yeux que ce n’était pas la peine, qu’elle savait déjà qu’ils ressentaient l’un pour l’autre les mêmes sentiments grandissants, sentiments que même les plus beaux sourires de l’univers ne seraient jamais en mesure d’exprimer.

- Très bien, marmonna Zhou en tournant tout à coup les talons. Aucun de vous ne donne l’impression de vouloir s’en sortir, je m’en vais donc rejoindre Fredrisch. Il est peut-être impulsif, mais il écoute ce que j’ai à dire et est décidé à combattre le mal, contrairement à vous.

- C’est bien pour lui, ricana Otori en s’allongeant dans l’herbe, les bras écartés, dans la position d’un mort.

- Attends-nous ! brailla Ageha en se lançant à la poursuite du ninja. Edge et moi venons avec toi !

Edge lui emboîta tranquillement le pas. En passant au-dessus d’Otori, il fut incapable de réprimer un soudain désir d’insulter ce visage fermé qui semblait s’être perdu dans une contemplation imperturbable du ciel ensoleillé.

- Pauvre crétin, grogna-t-il en s’arrêtant.

L’autre ne cilla pas.

- Moi aussi, je t’aime, se contenta-il de murmurer d’une voix presque inaudible.

- Va te faire voir.

Son envie étanchée, Edge put reprendre la marche, plus ou moins à contrecoeur. La perspective de retrouver Fred ne l’enchantait pas vraiment. Fred était le stéréotype de l’homme qui minait le moral de tout ce qui l’entourait. Crédule sous ses airs faussement méfiants, le regard fuyant, il ne pouvait pas être franc. La façon qu’il avait eue d’ordonner à Ageha de le suivre jusqu’à l’auberge de Dabilahro et Lara pour les combattre en dépit de la terreur indescriptible qu’inspirait le démon en armure noire à la jeune fille traumatisée par le meurtre de Samcore prouvait, à elle seule, sa lâcheté. Ses fioles de poison lui collaient bien à la peau ; obligé d’enduire sa lame d’une substance mortelle au cas où il raterait sa cible, comme le lâche hypocrite qu’il était.

- Edge ! cria Ageha. Dépêche-toi, Edge ! Zhou refuse de m’écouter !

Il pressa le pas afin d’aller voir ce qui se passait. Zhou avançait rapidement, l’expression contrariée, tandis qu’Ageha cherchait par tous les moyens de capter son attention. En vain. Elle avait beau lui parler, lui poser toutes sortes de questions, le ninja demeurait de marbre.

- Zhou ? s’enquit-elle. Qu’est-ce qui ne va pas, Zhou ?

Pas de réponse.

- C’est à cause d’Otori que tu ne veux plus nous parler ? insista-t-elle. Il t’a vexé ?

Rien. Edge décida alors de tenter sa chance.

- Zhou, dit-il, tu ne devrais pas t’en faire pour Otori. C’est un crétin. Je parie qu’il n’accepte pas l’idée d’être apparu ici pour avoir à accomplir de grandes choses, des choses qui le dépassent sûrement. Et comme il doit être de ceux qui trouvent toujours le moyen de rejeter la faute sur quelqu’un, il a opté pour la solution de facilité : la rejeter sur toi. Car tu en sais bien plus que nous sur toute cette histoire. Peut-être même qu’il est jaloux de toi, tout comme Fred.

Ses paroles ne croisèrent que le souffle doux et frais du vent qui commençait à se lever. Un peu désemparé, il considéra Ageha. Son magnifique minois embué par l’inquiétude, elle paraissait plus vulnérable que jamais. Une pensée poignante lui brisa le cœur : Dabilahro, Leona et Lion avaient essayé de lui faire du mal, étaient parvenus à blesser, physiquement et moralement, l’innocente colombe. Il se dit que s’il lui arrivait de rencontrer ces trois salauds, il leur ferait la peau, pour avoir osé verser du sang sur du blanc. C’était d’ailleurs ce qui l’avait poussé à accepter sa hache, la veille, se souvint-il, non sans ressentir une certaine tristesse.

Ageha se racla timidement la gorge.

- Zhou ? hésita-t-elle. Je vais être honnête avec toi, Zhou. La plupart du temps, je te trouve évasif et très distant envers tout le monde. Surtout envers moi, en fait. Mais malgré tout, je sais que quand tu es sévère ou autoritaire avec nous, c’est pour notre bien. Nous faisons tous partie du même groupe, et un groupe a besoin d’un chef, d’un leader, non ?

Le ninja ne daignait toujours pas répondre. Cependant, cette fois, il hocha la tête.

- Tu es un bon leader, s’empressa de continuer Ageha. Tu m’as sauvé la vie. Si tu n’avais pas été là, hier soir, Leona et son frère m’auraient tuée. Ils ont d’ailleurs failli y arriver. Et encore une fois, c’est toi qui, avec Edge, m’as encouragée à puiser en moi la force nécessaire à la guérison de ma blessure.

Edge prêta attention au ventre de la jeune fille. La cicatrice avait perdu de son horrible couleur violette, l’ecchymose qui l’entourait s’était atténuée. D’ici plusieurs jours, il ne resterait plus de cette satanée blessure qu’un horrible souvenir. Ainsi, leurs pouvoirs étaient bien réels, pas une divagation de l’esprit de Zhou. Ce n’était pas une révélation pour lui, mais la première fois qu’il abordait le sujet à tête reposée, avec une telle intensité qu’il en arriva à se demander de quel pouvoir il avait été investi, lui. Lorsque l’occasion se présenterait, il poserait la question à Zhou.

- Je ne te l’ai peut-être pas encore dit, mais je te suis très reconnaissante de m’avoir sauvée, continuait Ageha. Tu veux notre bien, Edge et moi en sommes convaincus. C’est l’une des nombreuses raisons qui font que nous pensons que tu es un excellent chef. Nous te suivrons partout où tu nous conduiras car nous avons confiance en toi, Zhou.

Ageha en avait certainement un peu rajouté. Ses efforts portèrent cependant leurs fruits. La flatterie prit, le masque de Zhou frémit : il esquissait l’ombre d’un sourire.

- Je fais de mon mieux, déclara-t-il d’une voix neutre. Le problème, c’est que vous avez tous parfois des réactions qui me dépassent. Il est déjà difficile de gérer un groupe en de pareilles circonstances, alors imaginez ce que ça peut devenir quand tous les membres du groupe se mettent à faire preuve de mauvaise volonté. Vous allez être mis à rude épreuve. Si vous voulez survivre, vous allez devoir montrer davantage de sagesse.

Ageha consulta Edge du regard. Elle s’apprêtait à dire quelque chose au ninja mais ne le ferait pas sans son approbation. D’un discret signe de tête, il la lui accorda.

- Tu sais, Zhou, dit-elle en baissant la tête à la manière d’une petite fille craignant de se faire gronder, je suis désolée d’avoir pu, à un moment, faire preuve de mauvaise volonté. Je regrette, sincèrement. Edge aussi…

- N’en parlons plus, l’interrompit Zhou, ce qui eut pour effet de la faire rougir. Pensons plutôt à l’avenir.

- Quel est le programme, chef ? plaisanta Edge.

- Nous allons d’abord récupérer Fredrisch. Il est à la sortie de la ville.

Une lueur d’espoir traversa Edge, et sûrement Ageha.

- A-t-il réussi à…

- Non. L’ensorceleuse dégénérée et le barbare à l’ombre violette vivent, il ne les a pas éliminés. Ensuite, nous partirons à la rencontre du combattant.

- Du combattant ? s’étonna Ageha, qui avait à peu près récupéré de bonnes couleurs.

- Nous partirons à la rencontre du combattant, confirma Zhou. Notre dernier allié. Il s’est éveillé il y a peu de temps, près d’ici.

- Et Otori ? s’enquit Edge.

Il voulait simplement montrer qu’il était capable de sagesse et d’esprit d’équipe. En réalité, il se fichait pas mal du sort d’Otori.

- Ne t’inquiète pas pour Otori, il nous suit. Il est loin derrière nous, mais il ne souhaite pas nous perdre de vue. J’espère juste qu’il ne nous causera pas trop d’ennuis.
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeSam 1 Déc - 3:18

Pauvre Zhou ! On voit encore une fois les personnalités bien marquées de tes personnages. Eh bien, j'aimerais pas me retrouver là dedans, dans un groupe comme dans l'autre; quelle mauvaise ambiance =/

Mais qui est donc le combattant ? Kéhéhé...

Eh bien attendons la suite avec impatiente Very Happy
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeDim 2 Déc - 11:55

La partie précédente est certes courte, mais elle clôt d'une bien belle manière l'ancien chapitre.

Quant à ce nouvel épisode, eh bien...il est ma foi fort bon !! Comme l'a souligné Akran, les personnalités se démarquent distinctement, et on sent que la tension est palpable parmis nos héros. Tous unis, que Diable !
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeLun 3 Déc - 0:14

Chapitre 4 : Défis En Série

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Partie 2 : Questions De Stratégie


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Il devait être aux alentours de quatorze heures – peut-être quinze, voire seize – et cela faisait près d’une demi-heure que Dabilahro avait enfilé sa cotte de mailles et endossé son armure. Les bras croisés en signe d’impatience, adossé contre un mur de la chambre misérable qu’il lui tardait de quitter, il regardait, contrarié, Dame Lara se vêtir. Visiblement peu pressée, elle prenait tout son temps, batifolait, alla jusqu’à se permettre la plus ignoble des futilités lorsqu’elle épousseta une à une toutes les roses en tissu cousues à sa robe.

- Aujourd’hui, vous avez décidé de jouer avec mes nerfs, Dame Lara, grogna-t-il. Si vous ne m’étiez pas l’utile et troublante compagne que vous m’êtes, je dévorerais votre cœur.

Après la fuite du chien qui répondait au sale nom de Fred, il avait éprouvé toutes les difficultés du monde à mettre Dame Lara debout. Littéralement retournée par le second rêve explicatif, elle avait tout d’abord fondu en larmes, pour ensuite lui reprocher de ne pas aimer Lion et de ne souhaiter que sa mort. Pour la calmer, il avait dû lui mentir, lui promettre qu’il ne lèverait jamais son arme sur Lion car Lion était un bon garçon, dans le fond. Il avait alors eu l’impression d’embrasser un cobra. Et à présent, voilà qu’elle riait à gorge déployée de sa plaisanterie qui n’en était pas vraiment une.

- Tu n’aimerais pas mon cœur, merveilleux tueur ! s’écria-t-elle entre deux éclats de voix. Il est empli de vertiges distordus et la brume éternelle qui l’enveloppe injecte en lui des doses pharaoniques d’amertume, différentes de la substance présente dans celui des protégés de Soul Calibur, que je présume succulente, douce et chargée de senteurs enivrantes, parfaitement à ton goût.

Il s’apprêtait à lui faire remarquer qu’il ne dévorait pas les cœurs de ses ennemis pour leur goût – exécrable – mais pour une toute autre raison, qu’il fallait être le Marquis Rouge – qu’il fallait être Lion – pour prêter des qualités pédantes à de telles choses – au sang – dans le but narcissique de mieux s’en délecter par la suite, quand il la vit poser sa perruque sur sa tête. Afin de ne pas retarder davantage ses préparatifs, il décida finalement de se taire. De toute façon, il doutait qu’elle eût été apte à comprendre de pareilles pensées, elle qui avait déjà du mal à mettre de l’ordre dans ses propres idées.

En la voyant déposer son corset sur sa poitrine nue, il se mit à craindre le moment où elle allait lui demander de l’aider à lacer l’étroit vêtement. En effet, ceux qui avaient élaboré cet engin de torture permettant aux créatures féminines de donner l’illusion d’avoir une taille irrationnellement fine et des seins énormes n’avaient pas dû penser qu’en plaçant les lacets à l’arrière, aucune femme seule ne pourrait jamais l’enfiler. Il fallait obligatoirement la présence d’une amie, d’une mère, d’une servante ; d’une autre femme. En l’occurrence, c’était à lui qu’allait revenir le rôle de l’autre femme. Qu’est-ce qui était le plus cruel ? Devoir participer à une guerre dans un monde sans pitié ? Ou devoir servir d’assistant à une bonne femme sophistiquée ?

- Mon ange infernal, murmura-t-elle du bout des lèvres en lui offrant son dos, j’implore leur précieuse aide à tes doigts maculés de sang.

Les yeux rivés sur les longs lacets que tenaient ses quatre pouces et index mal entraînés, Dabilahro entreprit donc de nouer l’engin de torture.

- Comment dois-je serrer ? s’enquit-il après avoir formé le premier des nombreux croisements qui longeraient bientôt la majeure partie de la colonne vertébrale de la belle.

- Aussi fort que dans tes cauchemars les plus déraisonnables, souffla-t-elle.

Il obéit. Au fur et à mesure qu’il progressait dans sa pénible escalade, il prenait un malin plaisir à tresser de plus en plus fort. Il fallait souffrir pour être belle, pensa-t-il, et Dame Lara souffrait. Elle commença par émettre des gémissements étouffés qui ne tardèrent pas à se muer en plaintes plus sonores, puis en petits cris de douleur. Tandis qu’elle peinait à engouffrer l’air dans ses poumons, il contempla un instant ses omoplates saillantes trembler sous sa peau blafarde, s’agiter de façon attirante, osée, presque provocante. Oui, Dame Lara souffrait, et cela la rendait belle.

- J’espère que je ne vous fais pas trop mal ? fit-il semblant de s’inquiéter.

Il avait un mal du diable à se libérer de l’emprise du désir qui s’agrippait à lui avec des griffes chargées d’un entrain féroce. Des griffes dont les deux objectifs étaient de réchauffer l’organe qui pendait de moins en moins mollement entre ses cuisses et d’admirer la souffrance que subissait Dame Lara. Il devait leur résister. D’une part parce que les circonstances favorables à ce genre de choses n’étaient pas réunies, et d’autre part parce que la belle lui avait déjà fait comprendre qu’elle ne voulait pas d’amant, qu’elle ne voulait pas de lui.

- J’avoue… Avoir connu meilleures sensations que celles-ci, hoqueta-t-elle.

Dabilahro avait accompli la moitié de sa besogne lorsqu’il décida de s’affranchir complètement de la bête en rut qui tentait par tous les moyens de s’immiscer en lui. Peut-être suffisait-il de penser à autre chose, d’aborder un sujet de conversation sérieux.

- Il est étonnant que nos ennemis aient commencé par s’attaquer à nous, déclara-t-il en croisant encore une fois les lacets dont les extrémités logées entre ses doigts raccourcissaient, lentement mais sûrement. Vous et moi sommes les deux plus puissants éléments de nos troupes, Dame Lara. Si j’avais été à leur place, je m’en serais d’abord pris aux faibles. A Lion ou à son bouffon, par exemple.

- La petite créature rigolarde et rigolote n’est point faible ! protesta Dame Lara. Je me suis malgré moi laissée immerger par ses yeux, hier soir, cet être exhale d’interminables rhapsodies rutilantes. La ferveur de son ambition, de sa volonté d’arracher sa voix à Lion m’a pétrifiée de terreur alors que je l’entrevoyais. Il m’a pétrifiée de terreur comme seuls les forts savent le faire. Quant à Lion, les similitudes le liant à toi ne sont pas isolées, merveilleux tueur. Lui et toi êtes les deux faces de la même pièce, d’une pièce maudite par les dieux en personne. Deux beaux messagers de la mort, chacun savourant des méthodes distinctes se reflétant néanmoins l’une dans l’autre, chacun s’octroyant différents mérites. Si vous vous unissiez, tous les deux, vous offririez aux restes de l’humanité leur châtiment le plus exquis. Leur ultime châtiment.

- Là n’est pas la question, Dame Lara !

Pour le coup, elle venait de mettre un terme définitif à son début d’érection. Le problème, c’était qu’il ne savait plus s’il devait l’en remercier ou l’en blâmer. Difficile à dire, après toutes les insanités qu’elle avait déblatérées à son sujet au cours des dernières phrases.

- Lion et Anussim ne savent pas se battre, marmonna-t-il, et il pleuvra de l’or le jour où ils mettront correctement à profit les dons qui leur ont été offerts en arrivant ici. Ce que je voulais dire, c’est que nos ennemis marchent à l’envers. Ca m’inquiète un peu. D’autant plus que le chien qui est venu tout à l’heure a eu ce qu’il voulait. Heureusement, Olive a agi au bon moment.

- Plaît-il ? Puisse le sens de tes paroles m’être expliqué, ange d’acier noir.

Il regretta qu’elle n’eût pas reçu le même don que lui, celui de savoir tout ce qu’il y avait à savoir sur les quatorze cabots du vingt-et-unième siècle apparus ici. Sur les douze cabots, puisqu’il ne se considérait pas lui-même comme un chien et qu’il en avait déjà rayé un de la liste, la veille.

- Ce matin, en vous réveillant, n’avez-vous pas eu une vision vous exposant votre mort ?

- Si, fit-elle d’une voix tremblante.

Il prit une grande inspiration.

- Cette vision signifie que vous êtes morte, ce matin. J’en ai eu une, moi aussi, ce qui veut également dire que je suis mort, juste après vous. Nous avons été tués par le défenseur de Soul Calibur qui est venu nous rendre visite. Il s’appelle Fred et son aura est corrosive tant il nous hait.

Dame Lara cessa tout à coup de respirer et laissa planer un petit silence lourd d’interrogations. Pourtant, il n’avait pas envie de répondre à ses questions. La situation était trop compliquée pour être expliquée avec de simples mots. Pourquoi n’avait-elle pas reçu ce fichu don ?

- Suis-je morte, à l’heure actuelle ? susurra-t-elle finalement. Es-tu mort, à l’heure actuelle ? Plaise au ciel qu’il ne nous soit rien arrivé de fâcheux.

Pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?

- Non, à l’heure actuelle, nous ne somme pas morts, soupira-t-il, agacé. Pour la simple et bonne raison que les aiguilles de l’horloge du temps ont été désorganisées. Lion a dû mourir peu avant ou peu après nous. Ou c’est Leona qui est morte, je ne sais pas. Bref, quoiqu’il en soit, Olive, le chien de garde qui donnerait sa vie aux deux frères s’ils le lui ordonnaient, a alors remonté le temps. Son acte avait sans doute pour but de rendre la vie à Lion – ou à Leona. Par la même occasion et sans le vouloir, il a ainsi annulé notre mort. Vous comprenez ?

Dabilahro avait tout juste achevé le laçage du corset de Dame Lara et il se fichait qu’elle eût ou non compris ce qu’il venait de lui expliquer. Son attention était retenue par le vertugadin – une étrange armature en bois souple que les femmes portaient sous leurs robes ou jupes pour les faire bouffer – et par l’immense robe que la belle n’avait pas encore enfilés. Mais ces deux horreurs ne seraient que la dernière étape des préparatifs de l’emmerdeuse. Avant elles, Dame Lara allait tout d’abord devoir s’affubler de tout un tas de froufrous – jupons, jarretelles et gants – noirs. C’en était trop, il ne pouvait pas se permettre de rester une minute de plus dans cette pièce que ses souvenirs ne finiraient jamais d’assimiler non pas à son premier tombeau, mais à l’antre d’une femelle superficielle.

- J’ai besoin de prendre l’air, bougonna-t-il en passant la porte de la chambre. Je vous attends dehors. N’oubliez surtout pas votre faux.

Au rez-de-chaussée, l’aubergiste papotait bruyamment avec deux hommes. Quand elle le vit, elle se tut soudain, blêmit, baissa la tête. Il n’était pas difficile de se rendre compte que cette grosse incapable avait peur de lui. Il la terrorisait. Les deux hommes qui l’accompagnaient, en dépit de leurs regards persistants, ne paraissaient pas plus rassurés. Inspirer la peur, l’effroi, Dabilahro aimait cela. Il s’agissait d’un sentiment flatteur, d’une démonstration incontestable de sa supériorité. Il tâcha cependant de ne pas trop en profiter car c’eût été adopter une attitude autosuffisante. L’autosuffisance ne menait nulle part, elle empêchait de progresser.

- Adieu, lança-t-il au trio intimidé pendant qu’il franchissait la sortie.

Dehors, il fut surpris de constater qu’il ne restait quasiment aucune trace de la neige qui s’était abattue sur la ville durant une bonne partie de la nuit. Il faisait une fraîcheur amère. Le vent doux transportait diverses senteurs humides, toutes agréables, qui parvinrent à apaiser son humeur. Pour savourer pleinement le court moment de solitude qui allait devenir sien, il choisit un mur proche de la porte de l’auberge contre lequel il s’appuya avant de laisser son regard se perdre dans le ciel sans nuages.

- J’ai mal au crâne !

La voûte céleste lui semblait creuse, ne lui procurait aucune émotion. C’était précisément ce dont il avait besoin. Les récents événements – sa mort – et la présence parfois encombrante de Dame Lara lui montaient à la tête et de ce fait, il ressentait une vigoureuse envie d’être confronté à des choses vides et silencieuses. Justement, le ciel était vide et silencieux. Revigorant. Un puits sans fond de renaissance.

- Je suis en train de commettre une énorme erreur de stratégie, murmura-t-il à la vue d’un couple de corbeaux qui planait avec nonchalance vers la sortie de la ville, ses deux longues paires d’ailes noires élégamment déployées au-dessus du monde.

L’idée lui avait traversé l’esprit subitement. Ce n’était pas en dormant la journée, en se levant après midi et en réfléchissant à partir de quinze ou seize heures qu’il allait parvenir à des résultats satisfaisants. D’ailleurs, cette erreur lui avait coûté la vie, Fred l’avait pris au dépourvu alors qu’il dormait. Pour vaincre, pour engloutir le monde dans son ombre violette armée du pommeau de Soul Edge, il allait lui falloir être aux aguets, sans cesse, observer attentivement l’ennemi, le prendre au dépourvu tout en protégeant l’allié. S’il s’y prenait bien, un seul ennemi atteindrait la cathédrale, où il serait mangé par six chiens et un roi.

- Ce pauvre survivant n’aura pas le temps de pousser le moindre hurlement, il sera déjà mort, dévoré par ma meute de chiens, ricana-t-il.

L’aura discrète de Zhou, l’aura corrosive de Fred, l’aura blanche d’Ageha, l’aura limpide d’Edge, l’aura morne d’Otori et l’aura courageuse de celui dont il avait avalé le nom se situaient toutes dans le même périmètre, autour de la ville. Quant aux auras de Lion, Leona, de leur chien de garde et du chiot, elles étaient éparpillées, au nord-est d’ici – fait incroyable, ces quatre débiles avaient su emprunter la bonne direction. L’idée était de contourner sagement les auras ennemies, pour se rapprocher le plus possible de l’aura rouge de Lion, de l’aura vide de Leona, de l’aura puissante d’Olive et de l’aura pétillante d’Anussim, sans toutefois les côtoyer. Il leur avait dit qu’il ne voulait plus entendre parler d’eux, alors autant éviter de les rejoindre, pour l’instant.

- Ainsi, j’aurai la meilleure place, jubila-t-il. Je ne m’endormirai que lorsqu’ils dormiront tous, je me réveillerai tôt le matin, bien avant leur réveil. Je pourrai voir sans être vu, contrôler les faits et gestes de tous les chiens.


Dernière édition par le Lun 10 Déc - 11:47, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeLun 3 Déc - 11:40

Bigre ! J'ai des sourcils étranges ! Very Happy

Sinon c'est ma foi toujours aussi palpitant, il ne s'est pas passé un seul épisode qui ne me fait pas penser "Mais c'est quand la suite ?".
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeMer 5 Déc - 0:14

Lion, ta vitesse d'écriture est phénomènale. On a à peine le temps de lire une partie qu'une autre parait alors. Shocked

Ceci dit, si cette même qualité y est toujours au rendez-vous, c'est pas un mal, hein ! Et puis, j'aime assez le personnage de Dabilahro, il a ce petit je-ne-sais-quoi qui le démarque un peu des autres, qui sont déjà fort charismatiques !

Ouais c'est bien, quoi !
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MessageSujet: Re: Destinées   Destinées - Page 10 Icon_minitimeJeu 6 Déc - 11:24

Chapitre 4 : Défis En Série

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Partie 3 : Le Combattant


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Quand il découvrit la profonde expression de tristesse qui hantait le visage de Fredrisch, Zhou se mit à craindre que son compagnon eût été hypnotisé par l’ensorceleuse dégénérée. Il ne connaissait pas tous les détails concernant le pouvoir de Lara, mais il savait que la folle possédait la capacité de déverser des torrents de sentiments déchirants – ses propres sentiments – à l’intérieur des esprits masculins qu’elle désirait anéantir. Alors torturés par des émotions qu’ils croyaient naïvement leurs, ceux-ci se retrouvaient engouffrés au fin fond d’une impasse exiguë et fuligineuse dont l’unique issue était la mort. Il n’était pas difficile d’imaginer le visage d’une victime de ce terrifiant pouvoir : le visage actuel de l’alchimiste – terne, fermé, vide de toute notion d’espoir.

- Fredrisch ? fit-il, inquiet. Qu’est-ce qu’elle t’a fait ?

Les épaules courbées, les bras ballants, l’alchimiste leva lentement vers lui un regard presque dénué de vie. « Presque » ; ce fut cette nuance qui permit à Zhou de comprendre que Fredrisch n’avait pas été ensorcelé par Lara, qu’il était simplement en train de subir le lourd poids de la défaite. Pour une raison ou pour une autre, il avait échoué dans le but qu’il s’était fixé, n’était pas parvenu, comme il l’avait tant souhaité, à éliminer l’ensorceleuse dégénérée. Il devait ressentir de la honte et du déshonneur – ce n’était rien, la honte et le déshonneur ne pesaient pas lourd dans la vie d’un homme en comparaison des choses sans nom que Lara pouvait y injecter, la scellant à tout jamais. En outre, cela allait lui servir de leçon. La prochaine fois qu’il aurait une décision cruciale à prendre, il considèrerait la situation avec davantage de sagesse avant de se jeter bille en tête au cœur du danger.

- Est-ce que tu vas bien, Fred ? s’enquit la bohémienne en avançant jusqu’à lui à pas mal assurés.

Zhou se doutait qu’elle avait posé cette question dans le but de paraître avenante. Mais Fredrisch salua cette gentille intention d’une brusque bourrade qui contraignit Ageha à reculer de plusieurs dizaines de centimètres.

- Dégage ! fulmina-t-il. Si tu étais venue avec moi, je les aurais eus. Tu n’as pas voulu m’accompagner, alors je les ai ratés. Dégage, c’est tout ce que j’ai à te dire.

Acerbes et cinglantes, les paroles de l’alchimiste parurent percuter la bohémienne de plein fouet. Le choc la pétrifia, secoua ses lèvres entrouvertes par la stupeur, lui arracha une pincée de larmes silencieuses. Après un court instant d’immobilisme, elle tourna les talons et courut s’asseoir en bordure du chemin, à l’ombre d’un gros arbre. Sans un mot, Edge ne tarda pas à aller la rejoindre.

- Nous sommes seuls, Fredrisch, murmura Zhou. Calme-toi et raconte-moi ce qui t’est arrivé, là-bas. Pourquoi ne les as-tu pas éliminés ? Pourquoi ne t’ont-ils pas éliminé ?

L’alchimiste lui sourit du sourire spasmodique et écarquillé d’un fou qui s’amusait d’une situation dont il ne saisissait ni les tenants, ni les aboutissants. Ses globes oculaires brillaient autant que deux étoiles filantes capables d’illuminer un ciel maussade. Il commença à produire de minuscules ricanements aigus, lents, qui s’intensifièrent, gagnèrent en rapidité, finirent par atteindre un rythme effréné et des sonorités alarmantes. Zhou s’apprêtait à reconsidérer l’hypothèse qu’il pût être sous l’influence de quelque maléfice jeté par Lara lorsque soudain, Fredrisch parla.

- J’étais à deux doigts de les avoir ! brailla-t-il en pointant son index et son majeur tremblants sous les yeux placides de Zhou. A deux doigts ! Mais il a fallu que j’aie une vision, juste au moment de passer à l’acte ! Une vision doublée d’une putain de crise d’épilepsie ! Appelle ça comme tu veux, je m’en fous ! Tu arrives à y croire, toi ? J’allais expédier ces deux pourritures en enfer quand j’ai failli avaler ma putain de langue en imaginant un monstre mauve aider cet enfoiré de Dabilahro à me décapiter ! Franchement, tu arrives à y croire ?

Zhou n’arrivait que trop bien à croire tous les événements que lui décrivait son compagnon et qui avaient pour cause le pouvoir déséquilibrant du protecteur.

- Mais ce n’est pas tout ! Quand cette connerie de vision s’est dissipée, je les ai quand même attaqués, ils m’ont assommé. Là, j’ai rêvé du Marquis Rouge et de ses connards de potes. Toi et les autres aussi, je présume. Et quand je me suis réveillé, ils dormaient encore. J’aurais alors pu les buter ! J’aurais pu ! Sauf que je ne me souvenais plus de rien ! Trou noir, amnésie totale ! J’avais l’impression d’être encore au vingt-et-unième siècle, tu te rends compte ? Je me suis rappelé de tout quand Dabilahro s’est réveillé et qu’il m’a attrapé le bras, et j’ai tellement eu la trouille que je me suis enfui comme un lâche ! C’était ridicule ! Ridicule !

Ces événements, loin d’être ridicules, étaient explicables, eux aussi.

- Fredrisch, soupira Zhou, si tu te calmes, je t’expliquerai tout.

Fredrisch hocha frénétiquement la tête de haut en bas et de bas en haut. Zhou attendit qu’il eût fini de trembler, de gémir, que ses yeux eussent recouvré leurs habituelles lueurs apaisantes et mélancoliques avant d’entamer le récit des explications qu’il avait à lui fournir.

- Très bien, dit-il une fois que l’alchimiste fut à peu près dans son état normal, ne m’interrompt pas. Tôt, ce matin, Lion, l’assoiffé de sang, a été tué par Otori, le chasseur. Son corps a été découvert par Olive, le protecteur – protecteur de Soul Edge, Lion et Leona. Entre-temps, tu as toi-même été tué par le barbare à l’ombre violette.

Le faciès de Fredrisch se décomposa littéralement mais il ne l’interrompit pas.

- Le protecteur a touché le cadavre de son protégé et le temps a reculé. L’assoiffé de sang et toi êtes alors revenus à la vie, transportés peu avant vos morts respectives. Olive s’est empressé de rejoindre Lion et de faire fuir Otori. Il a ensuite touché l’assoiffé de sang afin de lui montrer ce à quoi il avait échappé. A ce moment-là, Lion et toi êtes entrés dans une sorte de transe douloureuse à l’intérieure de laquelle vous avez reçu la vision vous permettant de comprendre que vous aviez été tués, et comment vous aviez été tués.

L’alchimiste le dévisageait avec une sorte d’ébahissement muet et insistant. Conséquence logique de tout ce qu’il venait d’entendre. Il allait probablement lui falloir du temps pour réaliser, digérer et accepter les informations déroutantes qu’il avait reçues. Toutefois, ce qui ne tuait pas rendait plus fort – les coups, si rudes fussent-ils, aidaient à évoluer, affermissaient l’esprit du guerrier présent en chaque Homme – et l’avenir allait exiger de lui – et des autres – énormément de force.

- Passons maintenant à l’amnésie que tu m’as décrite. La nuit dernière, je t’ai expliqué ton pouvoir. T’en souviens-tu ?

Timide signe d’approbation.

- Bien. Tu es capable d’infliger des hallucinations. C’est ce qui a dû t’arriver, tout à l’heure. Après avoir rêvé des protégés de Soul Edge, tu t’es toi-même infligé une illusion, un mirage qui t’a laissé entendre que tu te trouvais toujours au vingt-et-unième siècle. J’ignore pourquoi mais je suppose que tu espérais tellement fort n'être jamais apparu ici que tu as fini par te convaincre que c’était le cas.

Fredrisch n’eut aucune réaction particulière.

- Merci, Zhou, se contenta-t-il de répliquer.

Zhou était sur le point de dire quelque chose quand un cri l’incita à tourner la tête en direction de l’arbre sous lequel Ageha et Edge se reposaient. La bohémienne et le guerrier étaient encerclés par deux hommes et une femme qui les menaçaient avec deux poignards et une dague. Leur allure crasseuse, vulgaire et débraillée trahissait ce qu’ils étaient : des bandits en quête de pièces d’or. L’un d’eux – le chef, assurément – dardait de puissantes ondes négatives. Une longue balafre craquait la peau tannée de son front et sa queue de cheval brune et poisseuse pendait entre les muscles saillants de son dos. Son torse nu semblait insensible aux morsures du froid qui ne devaient cependant pas épargner quelqu’un qui ignorait le soutien de Soul Calibur. Ageha paraissait terrorisée tandis qu’Edge analysait calmement ses opposants, sans doute à la recherche d’un échappatoire.

- Ils se dirigent vers nous, Zhou ! observa Fredrisch.

En effet, deux autres malfrats arrivaient sur eux. Le premier était de petite taille, affichait un rictus sournois, tenait dans sa main droite le manche d’un poignard avec la lame duquel il se tapotait la paume de la main gauche. Le second était armé d’une hachette. Gras et nonchalant, le teint rose, il ressemblait à un porc. Tous deux revêtaient de grossiers habits faits de fourrure brune et grise.

- Je m’en charge ! murmura Zhou en saisissant son katana d’un geste calculé.

En quittant son fourreau, le sabre feula.

- J’arrive.
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